Une méthode d'entrainement aux virages de géant utilisant les virages S et les virages "bananes"

Par Greg Gurshman
Photos de Lev Akhsanov,
Sequences Galina Akhsanov et George Dubenetskiy


Traduit de l'anglais par Paul Trouilhet

Le slalom Géant est considéré par les entraineurs et les coureurs comme la discipline la plus technique dans les courses de ski alpin. Les meilleurs coureurs en slalom géant possèdent la rapidité des spécialistes du slalom et la capacité de couper une courbe des descendeurs. C'est pour cela que je conseille de réserver 70 % du volume total d'entrainement d'un athlète au géant. C'est particulièrement vrai pour les juniors et les athlètes en cours de progression. Cependant, passer simplement beaucoup de temps à faire des virages de slalom géant ne garantie pas que le coureur acquière une technique solide en géant. Une approche correcte pour développer des virages de slalom géant est, de mon point de vue, très importante.



Comme le montrent les séances d'entrainement, il est assez délicat d'arriver à faire couper à un coureur un virage relativement arrondi ressemblant à ceux réalisés ici par un spécialiste du géant le Finlandais Kalle Pallander sur une course de coupe du monde :




Typiquement, au lieu de couper une courbe très propre similaire à celle laissée par une star du slalom géant italienne Manuela Meolgg lors d'un entrainement,

 


Photo by author

l

soit les juniors dérapent pendant leur virage soit ils coupent des courbes peu bouclées dans la ligne de pente. Aucun de ces modèles de virages ne marche dans une course de slalom géant. En continuant de pratiquer sur leurs ski de géant à leur manière, les jeunes coureurs ne pourront pas s'approprier les vrais virages de slalom géant comme ceux montrés précédemment.


Comment trouver une solution à ce problème ?

Dans cet article je vais partager une méthode qui peut être utilisée pour l'entrainement aux virages de slalom géant. Cette méthode est basée sur une combinaison de deux types de virages utilisant des types de comportement de ski opposés :

- Virages de grand rayon parfaitement coupés.
- Virages arrondis et glissés.

Avant d'expliquer la méthode, je voudrais rappeler le problème qu'elle est sensé résoudre. Quel est le problème fondamental rencontré par les jeunes coureurs qui ne peuvent que couper des virages peu bouclés dans la ligne de pente, ou déraper leur virages ?

Le problème est le même dans les deux cas. Un skieur bascule simplement son ski sur la carre et se cale dessus pendant qu'il coupe un arc de courbe définit par la taille de guêpe des skis. Ainsi, le skieur ne peut contrôler la forme et le placement de la courbe du virage.

Cette forme de ski statique, basiquement constitué de deux positions figées de chaque coté de la ligne de pente, est assez courante chez les jeunes coureurs. Les jambes du coureur ne fléchissent pas entre deux courbes et ne s'étendent pas au début du nouveau virage. Par conséquent, dés que la piste est plus raide ou que le tracé impose des virages plus bouclés, les skis sont mis en dérapage. Il y a deux raisons principales à cela :

- Mécanismes de prise de carre incorrects

- Un manque de mouvement de jambes correct

Je propose de traiter de ces problèmes séparément. En particulier, j'utilise les virages rapides peu bouclés dans la ligne de pente pour travailler le mouvement du corps nécessaire à une bonne prise de carre. Puis, j'utilise des virages dérapés extrêmement bouclés pour travailler, la projection du centre de gravité du skieur en avant, et une flexion extension correcte des jambes. Ces mécanismes travaillés séparément se mélangent progressivement dans la technique correcte de slalom géant.

Revenons sur les virages dynamiques peu bouclés, aussi appelés "virages bananes" par certains entraineurs.


Photo by Lev Akhsanov

Dans cette photo l'auteur fait une démonstration d'un virage banane. Je suppose, qu'après avoir regardé les traces laissées dans la neige, personne n'aura de doute sur le bien fondé du nom donné à ces virages. Les virages bananes sont généralement utilisés sur pente moyenne ou faible. Seuls les skieurs de haut niveau les utilisent sur des pentes fortes pour réaliser des virages dynamiques. Le virage banane est de courte durée et est effectué dans la ligne de pente à grande vitesse, il permet au skieur d'acquérir une technique correcte de virage coupé par déplacement (i.e inclinaison) à l'intérieur de la courbe, en étendant sa jambe extérieure et en fléchissant l'intérieure. Les virages bananes sont très dynamiques et le skieur n'a pas le temps de se focaliser sur la flexion des jambes entre les virages et sur l'extension en début de virage. On peut voir une séquence correspondant à un virage banane sur le montage photo ci-dessous :


Photo by Lev Akhsanov


Cette démonstration de virage banane est photographiée à 10 images par seconde. On remarque que le skieur a effectué deux virages en une seconde. Avec un tel rythme, extrêmement rapide, seul le pilotage de carres ( par léger déplacement en avant et à l'intérieur de la courbe) peut être employé. Cependant, d'autres mouvements sont plutôt difficiles à travailler avec les virages bananes. Ainsi, essayer de travailler la flexion extension et la projection en avant du centre de gravité avec ce modèle de virage est voué à l'échec. En outre, les virages banane ne développent pas un rééquilibrage correct et les skieurs commencent souvent à oublier la spatule du ski extérieur.


A cause de tous ces aspects négatifs qui viennent inévitablement lorsque l'on travaille le pilotage des carres en utilisant les virages bananes, je recommande d'alterner avec des virages très bouclés, souvent appelés "virages S". Un virage S est un virage bouclé  où les skis glissent sans à-coups pendant tout le virage, comme je démontre ici


Photo by Lev Akhsanov

J'imagine, que comme dans le cas des virages bananes,  la raison pour laquelle ce type de virage est appelé "virage S" est évidente. Dans la séquence précédente le skieur exécute des "virages S" sur une piste pentue. Les pistes de pentes moyennes à raide sont préférables pour réaliser des virages S. Bien, en quoi sont-ils utiles ?

Tout d'abord, les virages S sont nécessaires pour travailler des mouvements ( tels que l'extension projection) qui échappent au coureur dans les virages bananes ou classiques. Ces mouvements d'extension et de projection du centre de gravité sont nécessaires pour réaliser des virages de slalom géant correctement.

Dans les virages S, les mouvements corrects peuvent êtres sentis et développés sans vitesse, presque au ralenti. La séquence ci dessus a été prise avec une cadence de 10 images par secondes. Il n'est pas difficile de voir qu'un virage S prend environ 2 secondes, alors que la transition entre deux virages prend plus de la moitié d'une seconde. Cette durée est suffisante pour que le skieur se concentre sur la flexion des jambes et l'extension dans le nouveau virage.

Afin que les exercices sur les virages S soient efficaces, le modèle de mouvement dans les virages S doivent êtres exagérés en terme d'extension et projection à l'intérieur de la courbe, comme montré sur une grande partie de la séquence ci dessous :



Photo by Lev Akhsanov

Les virages S présentés ici comportent le cycle biomécanique complet des mouvements utilisés dans un virage de slalom géant. Cependant, tout les mouvements se déroulent à une vitesse bien plus faible. Le skieur crée une prise de carres légère (peu de basculement des skis) sans couper complètement la courbe. Les skis glissent sur les carres continument tout au long de l'arc de courbe arrondi. Le pilotage continu des skis tout au long d'un virage arrondi présente de nombreuses difficultés, particulièrement pour les jeunes coureurs qui utilisent pour des virages coupés peu bouclés (parfois droits) exécutés par pilotage de carres et seulement en employant la taille de guêpe du ski.

Typiquement, ces coureurs réduisent le virage S à une mise en travers des skis en zigzaguant. Généralement, ils ont des problèmes pour contrôler la vitesse et maintenir la forme du virage. La transition d'une courbe lente dans une autre est aussi délicate, puisque les skis ne passent pas sous le corps à une telle basse vitesse. C'est pourquoi, il est important d'étendre légèrement ses jambes et de se mettre en avant (à l'intérieur de la courbe) comme démontré dans l'entrée du virage S de la séquence ci-dessous :

 


Photo by Lev Akhsanov

Bien que le virages S soient exécutés à une relativement basse vitesse, il est important d'éviter les positions statiques. Des mouvements doux et continus sont le but recherché, comme montré dans la séquence ci-dessus, où chaque photo est différente de la précédente.

Alors que les virages S renforcent certains mouvements corrects, ils peuvent aussi produire une extension verticale excessive. Le défaut de rotation ( le corps suit les skis) peut également être développé par erreur. Dans le but de ne pas développer ces mouvements incorrects, je recommande d'utiliser le virage S exécuté avec un double planté des bâtons sur le même coté comme montré ci-dessous :


Photo by George Dubenetskiy

Un double planté du bâton réalisé de cette manière impose une position correcte du haut du corps à la fin du virage. Il amène également une projection en avant du centre de gravité plus grande, qui place le corps plus a l'intérieur de la courbe. Cependant, les virages S avec un double planté du bâton ne doivent être utilisés que lorsque la forme du virage et l'exécution douce d'un virage S correct sont maitrisés.


Reste à savoir comment utiliser ces types de virages dans le but de profiter au maximum au développement du skieur ? Tout d'abord, nous avons un virage-banane, consistant à un maximum de dynamique, une prise de carres par inclinaison et un virage parfaitement coupé de grand rayon. Pendant qu'il réalise un virage-banane, le skieur a un contrôle minimal de ses mouvements. Le but principal étant de sentir la mécanique de prise de carres réalisée par déplacement du corps à l'intérieur de la prochaine courbe. Il n'y a pas vraiment de travail de la phase de transition entre deux virages en utilisant le virage-banane. Pour cela nous utiliseront la nouvelle approche, le virage S. Dans les virages-S, le skieur se concentre sur la flexion entre deux virages, la projection et l'extension avec un minimum de dynamique qui permet au skieur de sentir réellement ces mouvements.


Cependant les virages-S développent inévitablement des positions statiques. Ainsi, pendant qu'il réalise des virages-S, le skieur peut perdre le feeling d'un bon virage coupé. Les virages-bananes développent un bon pilotage de carres, mais ils présentent une carence dans d'autres éléments techniques nécessaires à la transition entre deux virages. C'est pourquoi, je recommande de ne pas abuser de l'un ou de l'autre de ces exercices. Mais plutôt d'alterner entre travail des virages-S et des virages-bananes.

Je reviens souvent à ces exercices quand un coureur a des problèmes en virage de géant. Par exemple, si le coureur manque de flexion et projection, j'utilise les virages-S ou d'autres exercices réalisés dans le modèle du virage-S. Si un coureur perd la dynamique et le feeling de la prise de carre, je reviens aux virages bananes ou a des éducatifs exécutés dans ce mode.


Il est très important que la pente soit appropriée à ces exercices. Faire des virages-bananes sur une pente un peu trop raide peux ne pas être bénéfique. De la même façon, des virages-S sur une pente trop faible ne produiront pas les résultats escomptés.



Il convient de mentionner que la méthode proposé est valable pour le Super G. Elle l'est également pour le slalom spécial, mais l'usage des skis de slalom spécial peut produire de nombreux effets secondaires et conduire à un mauvais modèle de mouvement. C'est pourquoi je recommande fortement l'usage des skis de géant pour les virages bananes et les virages S. Une fois qu'un bon virage de slalom géant est acquis, il pourra aisément être transféré au slalom spécial ou au super G.

J'espère que l'utilisation correcte et alterné des virages bananes et des virages S pour l'entrainement , permettra à de nombreux coureurs de développer de bons virages et leur donnera ainsi beaucoup de succès.

 

Cet article est une traduction de : "A method for developing GS turn technique using S-turns and banana-turns" disponible sur le site youcanski.com : A method for developing GS turn technique using S-turns and banana-turns .

Merci à Greg Gurshman de m'avoir permis de le traduire.