Mouvement de la jambe intérieure ou comportement des tibias pour des virages performants

 

Juillet   2006  Greg Gurshman / Photo montages by Stan Petrash

Traduit de l'anglais par Paul Trouilhet

 

Comme je l'ai déjà mentionné dans d'autres articles l'utilisation des deux skis dans un virage est un des fondamentaux de la technique moderne . Alors que le ski extérieur joue un rôle primordial dans la phase initiale d'un virage, l'action du ski intérieur est cruciale pour couper la dernière partie du virage.

Dans cet article je présenterai des nuances techniques pour effectuer un virage coupé avec l'aide du ski intérieur.

Tout d'abord il est nécessaire de rappeler un phénomène simple bien connu des entraineurs et des coureurs. – les forces d'inertie à la fin du virage, quand elles sont utilisées correctement, fournissent plus de vitesse que ce que pourrait créer le skieur par des mouvements spéciaux ou par effort musculaire. Un arc de courbe propre et optimal , aussi appelé "rayon allongé"  (en forme de virgule) permet le transfert d'énergie le plus efficace d'un virage à un autre. Pour amener un tel transfert, lorsque l'on enseigne la technique moderne de ski, il faut insister sur avoir les tibias parallèles et également basculés, avec les deux skis dessinant des arcs de cercles concentriques. C'est bien sur un modèle idéal. Il est réalisé avec un certain degré d'approximation en réalité. Néanmoins, les coureurs se battent réellement pour couper un virage idéal, avec les deux skis basculés également, simplement car c'est la manière la plus rapide pour faire des virages en course

Cependant, si vous regardez attentivement, vous pouvez remarquer que très souvent même les coureurs de haut niveau ne sont pas capables de démarrer le virage avec les tibias parallèles. Il y a plusieurs raisons à cela, par exemple :

- Essayer d'envoyer le ski extérieur aussi loin que possible à l'extérieur afin que le corps se déplace en ligne droite peut amener à une position semblable à l'image A.
- Il peux arriver que la projection du centre d'inertie du coureur en avant et sur les skis soit insuffisante en début de virage (ie un faible recentrement à la fin du virage précédent).
- Parfois l'attitude de l'image A est simplement causée par une faible vitesse, qui ne permet pas de démarrer le virage par inclinaison avec les tibias parallèles.

Quelle que soit la cause, les coureurs sont souvent dans l'attitude de l'image A avec les tibias loin d'être parallèles dans la phase initiale du virage comme démontré sur la photo ci-dessous.

  image A

Dans cette photo ma jambe gauche est étendue et le ski extérieur est fortement basculé. Cependant, mon ski intérieur est significativement moins basculé et il glisse presque à plat sur la neige. Essayer de continuer le virage avec cette position des jambes ne me permettrai pas de couper sur des arcs concentriques.

Seulement deux scénarios, tous les deux mauvais, sont possibles avec une telle position des jambes :

1)   Le ski intérieur est chargé et va pratiquement tout droit et fait sortir le ski extérieur de sa trajectoire. Le ski extérieur dérape alors pendant le reste du virage, ce qui contribue à une perte de vitesse.  

2)   Le skieur se débrouille pour s'équilibrer sur le ski extérieur (ce qui est assez difficile à faire) et le ski intérieur flotte et ralenti le virage.

Dans le dernier cas (2) la carre du ski extérieure s'ancre excessivement, ce qui contribue aussi à perdre de la vitesse dans le virage. Dans aucun des deux cas la vitesse ne peut être maintenue avec un transfert efficace des masses dans le virage suivant.

La solution est évidente - les deux skis doivent travailler ensembles pendant le virage coupé. Cependant, à la base, ce n'est pas facile à accomplir.

La réaction naturelle du skieur dans cette situation est de se pencher sur le ski intérieur pratiquement à plat, qui est placé sous le centre de masse du skieur. Cependant, pour terminer efficacement le virage, le skieur doit le réaliser avec une position où les skis sont basculés également. Pour réaliser cela le corps du skieur doit se déplacer à l'intérieur du virage alors que les skis finiront sur le coté du corps avec la projection du centre de masse venant bien à l'intérieur de l'arc de courbe du virage.

Dans cet exemple, qui peut être utilisé comme un modèle pour tous ceux qui essayent de maitriser la position des tibias, c'est la seule voie pour que je puisse le réaliser cela. Je garde beaucoup de pression sur le ski extérieur (environ 70-80%) pendant que je continue de déplacer mon corps à l'intérieur du virage en fléchissant le genou intérieur et en le déplaçant progressivement vers le centre du virage comme démontré sur la photo :

  

C'est vraiment important de commencer le mouvement du genou intérieur au moins dans la seconde phase du virage quand on est dans la ligne de pente. En même temps, on doit transférer beaucoup de poids sur le ski intérieur. Bien que la position parallèle des tibias ne soit complètement réalisée à ce point, on peut voir que la spatule de mon ski intérieur est engagée et commence à carver. Le rayon de courbure est significativement plus grand que celui dessiné par le ski extérieur. Afin de réduire la différence de rayon des arcs, je doit continuer à déplacer le genou intérieur pour augmenter l'angle de prise de carre du ski intérieur comme démontré sur la photo :

Lorsque le skieur est dans la lige de pente, les tibias doivent êtres pratiquement parallèles. Il est important de se rappeler que les spatules des skis doivent être de niveau. Une fente excessive, avec un ski devant l'autre, ne permet pas de charger efficacement le ski intérieur. Si les tibias sont parallèles et la fente minimale, les skis coupent proprement des arcs de courbes sans interférer l'un avec l'autre. Le ski intérieur est souvent moins déformé et coupe une courbe de rayon plus grand. Cependant, les skis ne vont pas jusqu'à se croiser, bien que leurs spatules puissent arriver tout près l'une de l'autre en fin de virage.

Comme on peut le voir sur la prochaine image, j'arrive à une position presque parfaitement parallèle des tibias en fin de virage. A ce moment,  les skis sont presque également basculés et positionnés loin de mon centre de masse.


Dans cette phase du virage le ski intérieur est chargé un maximum. Afin de maintenir une position équilibrée dynamique à la fin du virage, il est recommandé de sentir plus de pression sur sur le talon du pied extérieur tout en sentant la languette de la chaussure. Le contact entre le tibia de la jambe intérieure et la languette de la chaussure est augmenté. A ce moment le skieur doit sentir clairement la pression augmenter sur l'extérieur du pied intérieur au niveau de la plante des pieds.

Nous pouvons clairement voir ci dessous le mouvement par un des leader de la coupe du monde, le Suisse Didier Cuche, alors qu'il skie en libre sur un glacier.


 

Le mouvement résultant sur le comportement des tibia est évident. 

Regardez comment ces mouvements sont effectués par un skieur de coupe du monde en course.

Dans cette séquence photo, nous voyons un vainqueur de nombreuses courses Mondiales, le Finlandais Kalle Pallander. Il est aisé de remarquer que Kalle commence le virage avec les tibias non parallèles et les skis basculés différemment. En réalité, le ski intérieur est presque à plat et la hanche intérieure est assez loin de la neige (image 1). Cependant, pendant le virage (images 2 et 3), Kalle se déplace à l'intérieur, en direction du centre du virage. En même temps, il déplace le genou intérieur en direction du centre du virage, ce qui augmente l'angle de prise de carre du ski intérieur. Au début de la phase finale du virage (image 3 à la porte), Kalle place ses tibias et réalise une position presque parfaite du corps avec les skis également basculés. A cet instant, le déplacement du corps à l'intérieur du virage est évident si nous comparons à la position de la hanche intérieure de Kalle dans les images 1 et 3.  Sur l'image 4 la courbe est quasiment terminée et Kalle commence à lâcher les carres en déplaçant son centre de gravité en avant. Ce mouvement résulte, encore, dans une position  imparfaite des tibias, qui arrive à cause de la carre du ski extérieur qui décroche en premier alors que le poids est transféré pour un court moment sur le coté extérieur du ski intérieur.

Le montage suivant peut aussi servir d'exemple pour arriver à une parfaite position des tibias et des skis à leurs place dans le virage :

Nous avons ici le très prometteur jeune coureur Suisse Daniel Albrieght. Je suppose q'il est évident dans ce montage que Daniel, comme Pallander, s'efforce de maintenir sa vitesse dans la phase finale du virage en déplaçant le genou intérieur et en plaçant ses tibias.

En considérant qu'une conduite coupée d'une telle courbe ne prend pas plus de 0.5 seconde, le mouvement du genou pour placer les tibias doit être réalisé de façon instinctive. C'est pour cela qu'il requiert un travail technique ciblé et un bon timing.

Tout d'abord il est très important que le mouvement ne soit pas réduit à un simple mouvement du genou, mais prenne place en même temps que le déplacement du corps à l'intérieur du virage. Le mouvement seul du genou amènerait une prise de carre excessive du ski intérieur ou une chasse de la carre à la place d'une conduite avec les eux skis dans la phase finale du virage.

Je vous livre un exercice simple pour développer un mouvement parallèle des tibias. Initialement cet exercice devait être réalisé à basse vitesse sur une piste relativement plate.

Utiliser une inclinaison minimale du corps à l'intérieur du virage avec un grand écart de pieds, le genou intérieur est déplacé pour mettre les tibias en position et garder cette position à travers la moitié du virage comme démontré par l'auteur sur  la séries de photos suivante :


La difficulté de cet exercice augmente avec une position très écartés des skis. Il requiert un certain niveau d'équilibre et de distribution précise de pression entre le talon du pied extérieur et  la plante du pied intérieur. Le sens du contact entre le tibia intérieur et la languette de la chaussure est aussi important, car il permet d'avoir les spatules au même niveau.

Si l'on ne garde pas les spatules au même niveau, il est presque impossible d'engager la spatule du ski intérieur, un mouvement approprié qui vous permet de réduire la différence des rayons de courbures coupés par les deux skis.

Il est très important que, à faible vitesse, cet exercice ne soit pas réduit à déplacer les genou d'un coté à l'autre comme suggéré par quelques entraineurs et moniteurs. de tels mouvements induisent de faux comportements biomécaniques, qui devront être changés plus tard quand le coureur ira plus vite.

Pour avoir cela, la jambe extérieure doit être presque complètement étendue pendant l'exercice.

Réalisé correctement cet exercice induit un alignement articulaire utilisé dans les virages réguliers. En travaillant au placement des tibias avec l'aide de cet exercice ou simplement en faisant des virages sur une piste moyennement raide, les coureurs peuvent sentir que tous ces mouvements sont assez simples et viennent facilement. J'ai souvent à ôter ce type d'illusion. Il suffit de prendre une piste plus raide ou bien d'augmenter la vitesse. Alors, placer les tibias et engager au bon moment avec de la pression sur le ski intérieur devient assez difficile.

Dans une course, la tache est encore plus difficile. Donc cela vaut la peine de passer du temps à travailler pour avoir les tibias parallèles en ski libre aussi bien que dans les courses, en augmentent progressivement  la vitesse et la raideur de la pente.

Le bon timing et la symétrie des deux côtés doivent être réalisés avant d'aller plus vite ou sur un terrain plus difficile.

 

Cet article est une traduction de : "Movement of the inside leg or matching the shins for effective arcs" disponible sur le site youcanski.com : Movement of the inside leg or matching the shins for effective arcs .

Merci à Greg Gurshman de m'avoir permis de le traduire.